Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Blogue des stagiaires

La lutte contre la crise des déchets aux Philippines

Cet article est le deuxième d’une série sur l’exportation des déchets. Pour lire le premier, cliquez ici.

Malgré le fait d’avoir déclaré qu’il allait lutter contre les changements climatiques et résoudre le problème de la pollution liée aux plastiques lors de son discours d’inauguration le 30 juin dernier, le président philippin Ferdinand Marcos continue de recevoir de la pression afin qu’il agisse davantage et plus concrètement afin de s’attaquer à la crise environnementale au pays. Cette crise, qui est majoritairement liée à la pollution par les plastiques, produits toxiques et autres types de déchets, est un enjeu d’envergure aux Philippines. Bien que certaines mesures aient été mises en place au cours des dernières années afin d’adresser la crise du plastique, celles-ci ne sont pas suffisantes à elles seules (BAN Toxics Calls President Marcos Jr. To Address Plastic, Toxic, And Waste Pollution In The PH | Journal Online). En effet, il existe un phénomène global qui met un frein aux initiatives locales et qui a transformé les pays du Sud, tels que les Philippines, en dépotoirs personnels des pays du Nord. Il s’agit du commerce international de déchets. Et le Canada y participe.

Entre 2013 et 2014, la compagnie canadienne Chronic Inc. a exporté vers les Philippines des conteneurs étiquetés à tort comme contenant des matières plastiques destinées au recyclage. En réalité, ces conteneurs renfermaient majoritairement des ordures ménagères, telles que des déchets électroniques. Cet événement a déclenché une réelle controverse dans l’industrie mondiale de la récupération.

Du côté des Philippines, ce dossier a semé l’indignation de la classe politique. En effet, le président de l’époque, Rodrigo Duterte, a même menacé de « déclarer la guerre » au Canada. Même s’il s’agissait de menaces vides, la relation diplomatique entre les Philippines et le Canada a tout de même grandement souffert de cet incident. Les déchets ont finalement été rapatriés au Canada en 2019 (Les déchets canadiens aux Philippines sont chargés sur un navire pour Vancouver | Radio-Canada.ca). Des situations comme celle-ci n’ont rien de nouveau ou d’exceptionnel, mais restent souvent cachées (Exportation de déchets: nous devrions avoir honte | La Presse). En effet, au cours des cinq dernières années, pas moins de 123 conteneurs en route vers l’étranger ont été retournés vers le Canada en raison de diverses violations aux régulations internationales liées à l’exportation de déchets (Illegal Canadian trash keeps ending up overseas. And the federal government won’t say who’s shipping it | CBC News).

Bien qu’il s’agisse d’une pratique déplorable, l’exportation de déchets provenant des pays riches vers des pays plus pauvres est grandement normalisée. Ainsi, plusieurs pays, comme les Philippines, en subissent les impacts. D’ailleurs, dans ce pays d’Asie du Sud-Est, le climat d’injustice a donné naissance à plusieurs organismes militants, tels que EcoWaste Coalition et BAN Toxics.

La mission d’EcoWaste Coalition est de mettre fin au gaspillage par la promotion de la justice environnementale. Cet organisme communautaire vise à établir des solutions durables au gaspillage, aux changements climatiques ainsi qu’aux problèmes liés aux produits chimiques, pour les Philippines et  l’ensemble de la planète (About Us – Ecowaste Coalition). EcoWaste Coalition travaille présentement sur plusieurs projets touchant un ensemble de problématiques variées, comme le remplacement de sites de décharges par des centres de recyclage propres et axés sur la communauté tout en offrant de meilleures conditions de vie aux travailleurs informels de l’industrie du recyclage. Lors de la controverse entourant les conteneurs de déchets canadiens aux Philippines, la coordinatrice nationale d’EcoWaste Coalition, Aileen Lucero, a déclaré que son pays n’était pas le «dépotoir du monde» et que son peuple ne laisserait plus d’autres pays porter atteinte à leur dignité, à leur santé et à l’environnement (Les déchets canadiens aux Philippines sont chargés sur un navire pour Vancouver | Radio-Canada.ca).

Quant à l’organisation BAN Toxics, elle a été fondée en 2006 en réponse aux enjeux entourant le traitement des déchets aux Philippines. Elle s’est donné comme mandat de promouvoir la justice environnementale et la transition vers une économie verte. L’organisation a mis sur pied plusieurs projets au fil des années, dont un programme visant à éliminer les produits toxiques dans les écoles ainsi qu’une campagne sur la ratification de la Convention de Bâle. De plus, elle porte une grande importance au partage d’expertise et aux initiatives locales. Par ailleurs, elle bâtit activement des liens de solidarité avec d’autres groupes de la région sud-est asiatique afin de créer un sentiment de communauté entre pays qui reçoivent malgré eux les déchets provenant des pays riches (History and mandate – BAN Toxics).

Avec un nouveau président à la tête de l’État, plusieurs organismes et groupes militants philippins réitèrent l’urgence de protéger les Philippines pour s’assurer que leur pays ne se transforme pas en dépotoir dédié aux déchets des pays riches. Une des solutions à ce problème serait de ratifier la Convention de Bâle, soit un traité international interdisant l’exportation de matières dangereuses. Selon BAN Toxics, il est temps de prioriser la protection de l’environnement et la santé publique. Il est primordial de résoudre le problème avant que les impacts ne deviennent irréversibles (BAN Toxics Calls President Marcos Jr. To Address Plastic, Toxic, And Waste Pollution In The PH | Journal Online).