Des associations pour la défense des droits, des organismes communautaires et de solidarité internationale, des syndicats et d’autres citoyen·nes appellent la population à faire front pour dénoncer les politiques de la CAQ qui démantèlent, brique par brique, l’édifice de nos services publics et de nos droits sociaux et politiques.
Les projets de loi s’enchaînent les uns après les autres et s’ajoutent à d’autres mesures dictées par une même logique. Il s’agit d’affaiblir nos institutions démocratiques et de réduire au silence les voix critiques capables d’exprimer des désaccords légitimes et de défendre les droits de toutes et tous, incluant les minorités les plus défavorisées, marginalisées et discriminées. Marquant un tournant autoritaire et démagogique, ces politiques, souvent adoptées sous bâillon, détruisent les bases de notre démocratie pour répondre aux intérêts d’élites économiques.
Des lois antisociales et antisyndicales
Le projet de loi 14 (anciennement projet de loi 89) et la réforme annoncée du régime syndical (projet de loi 3) s’attaquent non seulement aux droits des travailleuses et des travailleurs partout au Québec, mais s’inscrivent dans une tendance inquiétante de remise en question des mécanismes qui protègent notre démocratie. Il s’agit de la pire offensive d’un gouvernement contre le mouvement syndical.
Avec le projet de loi 1, Loi constitutionnelle de 2025 sur le Québec, déposé le 9 octobre 2025, le gouvernement de la CAQ menace de démanteler tout le système québécois de protection des droits de la personne, alors que la Charte des droits et libertés de la personne célèbre ses 50 ans d’existence. Élaboré derrière des portes closes, sans aucun débat ni consultation, ce projet n’a rien d’une constitution. Témoignant d’un autoritarisme mal dissimulé, il risque d’affaiblir les pouvoirs de la société civile. Ainsi, les outils juridiques pour la défense de nos droits et libertés, comme la Charte et la possibilité de contester des lois devant les tribunaux, sont ébranlés. En instrumentalisant la « souveraineté parlementaire » et « les valeurs québécoises », le projet de loi 1 engendre une dérive identitaire dangereuse, comme on n’en a pas vu depuis Duplessis.
Dans une déclaration publiée le 13 novembre dernier, le Barreau du Québec affirme que ces projets de loi « comportent des dispositions qui s’écartent de manière importante des valeurs et des traditions de la société québécoise au profit d’un renforcement du pouvoir de l’État », et craint ainsi une « érosion de l’état de droit au Québec ».
Une dérive dangereuse aux relents trumpistes
Devant la montée de l’extrême droite et de pratiques autoritaristes du pouvoir un peu partout dans le monde, les fondements mêmes de nos systèmes démocratiques sont menacés. Au Québec comme ailleurs, des droits que nous pensions acquis sont mis à mal par des décisions politiques.
Dans une logique affairiste et au mépris de la science, les coupures de centaines de postes et les fusions d’établissements dans la fonction publique nous empêchent d’agir de manière pertinente pour protéger nos écosystèmes et le bien commun. Tout ceci facilite l’approbation de grands projets industriels, tout en limitant la possibilité de contrôles environnementaux et liés à la santé publique.
La déclaration récente de François Legault qui, en réponse à l’appel de Donald Trump, positionne le Québec comme un acteur majeur de l’industrie militaire est troublante et représente un virage dangereux pour notre société et la planète. D’autant plus que cette militarisation de l’économie s’associe à des discours et des décisions contre l’immigration et les droits des personnes réfugiées et demandeuses d’asile.
La baisse des seuils d’immigration, l’annulation du Programme de l’expérience québécoise (PEQ) et le recul des droits des personnes demandeuses d’asile montrent clairement la trajectoire actuelle du gouvernement de la CAQ. Alors que le Québec restreint l’accès au territoire au nom d’une logique utilitariste, il investit parallèlement dans l’industrie militaire, tirant profit des conflits et de la crise climatique qui appauvrissent les populations et les forcent à fuir.
Aujourd’hui, le génocide à Gaza est le symbole brutal des conséquences toxiques engendrées par la complaisance envers un gouvernement raciste et totalitaire, guidé par des objectifs coloniaux : un monde dominé par la peur, la militarisation et l’instrumentalisation et le mépris envers le droit international. Malgré les condamnations de l’ONU, il est honteux que le Québec renforce ses liens diplomatiques et économiques avec Israël et refuse d’accorder la RAMQ aux familles évacuées de Gaz, alors que plusieurs experts en génocide ont reconnu qu’un génocide est commis contre le peuple palestinien.
Ce 29 novembre, à l’occasion de la journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, reconnaissons qu’une atteinte aux droits des un·es est une atteinte aux droits de toutes et de tous.
Défendre et devenir une société solidaire, juste et démocratique
De plus en plus de Québécoises et de Québécois ont du mal à joindre les deux bouts. Partout, la crise du logement et de l’itinérance a pris une ampleur alarmante. La situation touche encore davantage les peuples autochtones. En même temps, à l’heure où la planète arrive à un point de bascule, la CAQ impose des reculs en matière de législation et de réglementation environnementales. En dépit de l’urgence des problèmes qui devraient nous préoccuper, le gouvernement détourne l’attention de ses propres faillites en cherchant des boucs émissaires, comme les personnes migrantes et immigrantes et les minorités religieuses. Au lieu de chercher à résoudre les sources des problèmes sociaux, il s’attaque et suspend le financement de groupes qui œuvrent à l’amélioration de la société.
Nous avons à cœur un Québec qui choisit la solidarité plutôt que l’exclusion, le respect plutôt que la répression, la dignité plutôt que la peur, la justice sociale plutôt que la concentration des richesses entre les mains d’une poignée de privilégié·es. Le Québec que l’on veut est ancré dans des valeurs de solidarité, d’équité et de justice sociale et aura besoin d’être à l’écoute de toutes les voix, dans leur si belle diversité, et dans le respect de cette dissidence rebelle, critique et libre qui a longtemps teinté l’image du Québec.
Le 29 novembre prochain, nous serons dans la rue pour protéger la vision de la société québécoise que l’on veut. Une société plus juste, plus égalitaire et plus inclusive.
Auteurs et autrices de la déclaration :
Zahia El-Masri, Travailleuses et travailleurs pour la Palestine
Laurence Guénette, Ligue des droits et libertés
Yasmina Moudda, Alternatives
Amélie Nguyen, Centre international de solidarité ouvrière (CISO)
Amel Zaazaa, Observatoire pour la justice migrante
Elles cosignent ce texte avec Bertrand Guibord, Conseil central du Montréal métropolitain─CSN, Marc-Édouard Joubert, Conseil régional FTQ Montréal métropolitain, Amir Khadir, ex-député de Québec solidaire, Roger Rashi, militant et Patrizia Vinci, militante féministe et communautaire.
Depuis dimanche dernier, ce texte a reçu plus de 600 appuis, dont près de 200 issus de regroupements et organismes de la société civile du Québec. Parmi les groupes signataires, y figurent notamment : la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI), l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), le Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA), le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), le Regroupement des femmes de la Côte-Nord, le Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM), le Réseau québécois d’action pour la santé des femmes (RQASF), le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), la Table de regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles (TRPOCB), le Réseau québécois des groupes écologistes (RQGE), l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), la Grande mobilisation pour les arts au Québec (GMAC), le Centre de formation populaire (CFP), Au bas de l’échelle, la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC), la Fédération des femmes du Québec (FFQ), L’R des centres de femmes du Québec, le Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec, le Carrefour d’éducation populaire de Pointe-Saint-Charles, le Centre des travailleurs et des travailleuses immigrants (IWC-CTI), Club Ami, Mères au front, le Réseau Demain le Québec, le Mouvement de la jeunesse palestinienne (PYM), la Revue Liberté, Voix juives indépendantes (pôle francophone et section Montréal), la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et de nombreux autres.
La liste complète des signataires est mise à jour ici : https://www.alternatives.ca/2025/11/lhiver-sera-chaud-la-caq-a-declare-la-guerre-a-la-societe-civile/
